Développement durable et énergie
[DVD1] Développement durable & Energie
Nous rebâtirons la gouvernance de l’environnement et de l’énergie pour que la France puisse faire face aux grands défis du développement durable
Confisqué depuis trop longtemps par les technocrates et les associations écologistes, le débat sur le développement durable est devenu illisible pour les Français, et stérile pour nos institutions qui peinent à se réformer. Comme illustré dans le film documentaire Demain (2015), des solutions concrètes existent. Il y a urgence à faire face aux grands enjeux environnementaux et énergétiques ; parce qu’elles sont complexes et qu’elles requièrent une vision à long terme, nous porterons ces questions avec clarté et au plus haut niveau de l’Etat et en Europe.
Nous avons collectivement le devoir de préserver notre environnement. Il s’agit d’une de nos richesses les plus précieuses, parce que l’une des plus fragiles. Sauvegarder notre environnement, c’est perpétuer la qualité de vie sur notre territoire, c’est maintenir des activités qui font vivre un grand nombre de Français, c’est une nécessité pour ne pas hypothéquer l’avenir de la Nation. Cette exigence, nous la devons à nos enfants ! L’Etat doit donc avoir l’autorité suffisante pour répondre avec justice aux grands défis environnementaux (changement climatique, pollution de l’air, de l’eau et des sols etc.). Entre le laissez faire court-termiste qui détruit l’environnement et l’écologie punitive qui asphyxie notre économie, nous devons construire une nouvelle voie à la fois exigeante et pragmatique.
La dimension environnementale doit être intégrée à toutes les initiatives de l’Etat et du secteur privé, dès leur conception. La gouvernance de l’environnement doit être simplifiée car elle est aujourd’hui trop diluée dans l’interminable liste des Hautes Autorités et autres Conseils Environnementaux. Il n’y a pas d’action possible dans ce domaine sans l’implication de tous les citoyens et la reconnaissance des responsabilités de chacun.
Nous referons de l’environnement un enjeu public partagé en faisant construire un tableau de bord d’indicateurs d’état de l’environnement afin que les Français puissent enfin connaître le résultat direct de leurs actions quotidiennes (voir fiche DVD2). Ensuite, nous moderniserons les politiques de l’eau (voir fiche DVD4) et de gestion de la biodiversité, notamment en outre-mer (voir fiche DVD5), pour protéger et développer ces ressources essentielles. Pour finir nous favoriserons le développement du véhicule électrique en facilitant notamment les investissements indispensables à son déploiement (voir fiche DVD3).
Nous déplorons que les questions énergétiques, cruciales pour notre avenir, n’aient pas été sérieusement abordées par la classe politique des trente dernières années. Le choix du “tout nucléaire” des années 1970 était visionnaire. Le renouveau aujourd’hui, c’est prendre les orientations stratégiques qui bénéficieront à nos enfants ; c’est faire de la France un modèle en matière de politique énergétique en continuant d’offrir à tous les Français une énergie abordable et non polluante, tout en garantissant l’indépendance énergétique de notre pays. L’Etat doit fixer les objectifs économiques, géopolitiques et environnementaux de sa politique et laisser émerger les meilleures technologies de production, qu’elles soient nucléaires, éoliennes, solaires ou hydrauliques.
Le secteur de l’électricité est en train de vivre une révolution. Le modèle historique d’organisation industrielle, monopolistique, vertical et centralisé incarné par EDF, doit être profondément revu pour répondre aux enjeux soulevés par les évolutions technologiques telles que l’irruption du numérique dans la gestion énergétique ou la montée en puissance des énergies renouvelables et du stockage d’énergie. En parallèle, nous devons accompagner ces évolutions par une gestion responsable de notre parc nucléaire. Nous obligerons donc EDF à produire un échéancier détaillé de prolongement ou de fermeture des centrales, qui donnera la visibilité nécessaire aux filières industrielles pour que les technologies et les champions de demain puissent de nouveau émerger (voir fiche DVD6). Nous simplifierons les trop nombreuses contraintes administratives qui entravent encore le développement des énergies renouvelables (voir fiche DVD7) et encouragerons en particulier l’autoconsommation qui permet à chaque Français de devenir acteur de sa propre consommation (voir fiche DVD8).
[DVD2] Performance environnementale : mesurer, c’est progresser
“Nous pouvons compter sur la force du peuple français. Il est prêt. Il a déjà changé. Il a tiré toutes les conséquences, dans son comportement comme dans ses attentes, du changement climatique”
Bruno Le Maire, Ne vous résignez pas, p. 153
I. Pourquoi ?
Dans un sondage datant de 2015, 19,3 % des Français considéraient qu’agir pour l'environnement n'en vaut la peine que si cela leur fait gagner de l'argent et une proportion encore plus importante d’entre eux (23,7 %) se disait être désengagée face aux problématiques écologiques. Ce désengagement peut être lié au sentiment d’impuissance individuelle pour faire face au changement climatique. Face à ce constat, il est urgent que l’État agisse rapidement pour sensibiliser les citoyens au changement climatique.
Il est cependant difficile pour les Français d’appréhender l’ensemble des enjeux environnementaux compte tenu de l’étendue des sujets traités : production d’énergie, traitement des déchets, gestion de l’eau, pollution relative à l’utilisation des transports, etc. Le développement durable est par ailleurs souvent perçu, à tort, comme punitif ou nécessitant un sacrifice, notamment financier, trop important pour les ménages à travers la mise en place de nombreuses taxes.
Nonobstant une volonté de pédagogie de la part des pouvoirs publics depuis la tenue de la COP 21 à Paris et l’organisation de nombreux événements associant le grand public, cette méconnaissance des sujets environnementaux est liée en partie à l’absence de diffusion récurrente de données écologiques fiables, structurées et avant tout lisibles.
II. Quoi ?
Il est nécessaire que les citoyens disposent d’une vision simple et opératoire pour connaître la situation de l’environnement au niveau national mais également local et, d’autre part, suivre le progrès de l’évolution de cette situation en fonction des actions quotidiennes de chacun.
En économie, l’information périodique du grand public et l’évaluation des politiques publiques se basent sur la mise en place d’indicateurs transparents connus de tous et repris généralement par la presse : le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB), le taux de chômage, etc.
Afin de faire face au problème de l’indifférence et du désengagement des Français sur les sujets environnementaux, nous proposons de mettre en place un tableau de bord clair synthétisant les principaux indicateurs de l’état de l’environnement.
Dans le cadre de la stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable adoptée en 2015, le gouvernement actuel a mis en place un observatoire qui suit une quarantaine d’indicateurs sur les quatre enjeux suivants : le changement climatique, la perte accélérée de biodiversité, la raréfaction des ressources et les risques sanitaires environnementaux.
Nous proposons d’aller encore plus loin en s’appuyant sur les nombreux réseaux de collecte de données existants (universités, instituts scientifiques, associations) pour sélectionner et alimenter un nombre plus restreint d’indicateurs sur lesquels les Français pourraient voir le résultat direct de leurs actions quotidiennes, et de celles des services de l’Etat.
La sélection des indicateurs et la définition des cibles d’amélioration devra se faire en cohérence avec les indicateurs environnementaux déjà suivis au niveau européen mais également au sein de l’OCDE afin de permettre une comparaison périodique des résultats français avec ceux de nos voisins.
A titre d’illustration, nous pourrions suivre l’évolution des indicateurs suivants, sans que cette liste soit exhaustive : la consommation d’énergies fossiles, les superficies boisées, l’indice de pollution de l’air en milieu urbain, l’utilisation des transports en commun pour les trajets domicile-travail, les surfaces cultivées en agriculture biologique, etc.
Au niveau des régions et des territoires, il existe déjà des initiatives intéressantes qui permettent de renseigner utilement et simplement les citoyens, comme par exemple Airparif sur la qualité de l’air en Ile-de-France. En conséquence, ce tableau de bord pourrait, selon les sujets, être décliné au niveau des collectivités locales pour les thématiques environnementales sur lesquelles elles disposent d’un pouvoir de décision. A titre d’exemple, nous pouvons citer la gestion des déchets à travers le suivi du taux de recyclage des déchets municipaux et du taux de population couverte par une tarification incitative des déchets, ou la gestion de l’eau, notamment à travers la qualité des cours d’eau ou la part de la population exposée au risque d’inondation.
L’objectif d’une telle démarche est que tout un chacun puisse appréhender plus facilement les problèmes environnementaux, suivre les progrès accomplis et donner un niveau de compréhension adapté.
Par ailleurs, il est avant tout nécessaire pour que les citoyens puissent être pleinement acteurs de cette démarche qu’une diffusion transparente de ces indicateurs soit assurée. Pour faire suite au succès de l’application la “météo de l’économie française” qui agrège une série de statistiques sur la situation française, les indicateurs environnementaux seront publiés sur un portail Internet dédié, ludique et avant tout pédagogique.
En complément, afin de permettre au monde politique de s’investir sur une thématique particulière selon l’actualité, un rendez vous annuel sera mis en place pour faire le bilan, mettre à jour les objectifs et définir les actions nouvelles mettre en œuvre pour les atteindre.
III. Comment ?
Cette démarche de construction d’indicateurs sur différentes thématiques (gestion des déchets, raréfaction des ressources, etc.) servira de référence pour informer les Français et encourager enfin les dynamiques de progrès en remplacement de la vision punitive actuelle sur les questions environnementales. Toutes les politiques environnementales seront alors jugées sur la base de l’évolution des indicateurs associés.
Par décret du 16 août 2013, une commission spécialisée du conseil national de la transition écologique (CNTE) a été chargée de l’élaboration des indicateurs nationaux de la transition écologique et de l’économie verte. Nous modifierons le chapitre IV du titre III du livre Ier du code de l'environnement (partie réglementaire) afin de permettre la mise en place d’objectifs chiffrés annuels pour chaque indicateur et formaliser la demande d’un plan des actions à mener en vue d’atteindre cette cible, accompagné d’un échéancier.
IV. Combien ?
La mise en place de nouveaux indicateurs et le travail de collecte devront être réalisés notamment par l’INSEE, l’ADEME et le Commissariat général au développement durable. En conséquence le coût restera marginal compte tenu des synergies des missions actuelles des différents organismes.
[DVD3] Transports électriques : l’avenir
«La France, c’est aussi la liberté d’entreprendre, la créativité industrielle, la maîtrise des technologies les plus pointues. »
Bruno Le Maire, Ne vous résignez pas ! p. 139
I. POURQUOI ?
Le potentiel et la pertinence de l’usage industriel des véhicules électriques sont d'ores et déjà démontrés, notamment dans les espaces confinés (les mines, les fonds marins et les bâtiments). Il en est de même dans le transport en commun en ville, dans le domaine aérien ainsi que dans les espaces qui doivent être préservés, tels les parcs naturels et de loisirs.
Notre préparation en amont à l’avènement des véhicules électriques grand public (et autonomes) permettra de répondre à plusieurs enjeux :
- Le bénéfice d’économies d’échelles dans la fabrication des véhicules et des infrastructures afin d’en diminuer le coût ;
- L’accès de nos entreprises au leadership de l’industrie du transport de nouvelle génération ;
- Le remplacement de notre consommation d’hydrocarbures par de l’énergie décarbonée dans le transport :
- En France en 1990, le transport était à l’origine de 15% des émissions à effet de serre. Aujourd’hui, cette activité en représente plus de 25%. Or, pour la majorité des Français, le véhicule particulier reste une nécessité pratique.
- Le transport touche les Français dans leur quotidien : les dépenses de carburants représentent plus de 5% en moyenne des dépenses des ménages et plus de 6% pour les ménages des zones rurales. A noter également que près de ¾ des Français se rendent au travail en voiture;
- L’amélioration de notre empreinte carbone et de la qualité de l’air dans les villes :
- Les carburants sont également sources d’importantes pollutions locales : particules, oxydes d’azote, monoxyde de carbone, etc. Ces pollutions viennent dégrader la qualité de l’air, en particulier dans les villes où le trafic routier est important, et ont un impact sur la santé de leurs habitants ;
- L’adaptation de notre réseau électrique à des points de recharge de batteries mobiles (devant permettre une circulation des véhicules électriques partout en France et en Europe sans contraintes, en anticipant les risques d’instabilité et de congestion).
Néanmoins, le véhicule électrique pour les particuliers ne pourra satisfaire nos exigences que lorsque certaines conditions auront été remplies. D’abord, l’autonomie des véhicules électriques devra se rapprocher de celle des véhicules à carburant. D’importants progrès ont été réalisés mais demeurent insuffisants. Ensuite, le temps de recharge des batteries pour les automobiles demeure trop long (environ 8 heures en charge normale). Une charge rapide est possible, procurant 80% de la capacité de la batterie en 30 minutes. Cependant, la multiplication des points de charge express causerait des problèmes de stabilité au réseau électrique. Enfin, les infrastructures sont quasi-inexistantes, alors que la normalisation des équipements et services à l’échelle européenne se met en place. Le conducteur d’un véhicule à moteur peut se ravitailler en carburant ou faire réparer son véhicule partout en Europe. Le conducteur d’un véhicule électrique devra pouvoir bénéficier des mêmes avantages. Les infrastructures de recharge doivent se développer pour couvrir l’ensemble du territoire à l’échelle européenne.
II. QUOI ?
- Nous encouragerons le développement des véhicules électriques pour les particuliers, les transports publics et l’usage industriel.
- Nous participerons au financement de la recherche pour le stockage mobile et le développement des véhicules électriques et autonomes, en fléchant une part du programme des investissements d’avenir (PAI) vers le stockage mobile ;
- Nous organiserons une concertation de l’État avec le secteur privé pour le recyclage des batteries des véhicules. Les batteries en fin de vie des véhicules électriques peuvent avoir une deuxième vie, pour stocker l’énergie dans les bâtiments par exemple. Une filière est à construire, en partenariat avec l’ensemble des acteurs : constructeurs de batteries, constructeurs automobiles, acteurs de la production d’énergie, etc.;
- Nous anticiperons l’adaptation du réseau électrique aux nouveaux modes de consommation et mettrons sur pied un plan d’adaptation du réseau électrique intégrant un réseau de recharge des batteries, la modulation induite de la demande et l’exploitation de l’énergie stockée dans les batteries inactives. Une concertation sera mise en place entre les acteurs de la production d’électricité, de l’exploitation des batteries, et les gestionnaires de réseaux pour définir les outils de pilotage et de financement nécessaires ;
- Nous porterons comme une priorité ce dossier au niveau européen pour nous accorder avec nos partenaires européens sur la normalisation des outils et services utiles au transport électrique.
III. COMMENT ?
La France exploitera ses atouts en développant des solutions pour la transformation générationnelle du transport. Nous favoriserons la concertation des acteurs pour réduire les coûts des nouveaux systèmes et simplifier l’utilisation des véhicules électriques.
- La France possède de nombreux instituts, universités et centres de recherche publics et privés. Pour demeurer au premier rang dans l’industrie du transport, l’État doit participer aux efforts de développement du stockage embarqué et des véhicules autonomes et prévoir un soutien au déploiement des infrastructures.
- Les entreprises françaises (notamment de l’énergie, de la distribution et de l’automobile) seront associées pour un développement efficace et normalisé des nouveaux outils et services du transport en France et en Europe.
- Le déploiement du parc électrique dans le transport modifiera les forces et les faiblesses de notre réseau électrique. Nous étudierons les adaptations au système qui seront requises à l’occasion du déploiement des véhicules électriques.
IV. COMBIEN ?
Le coût de la transition du moteur à combustion au moteur électrique dans le transport sera essentiellement porté par le secteur privé (déploiement de bornes de recharges, adaptation du réseau, etc.).
L’aménagement d’infrastructures pour l’alimentation et l’échange des batteries exigeront des investissements considérables ; ceux-ci seront à la charge du secteur privé. Des stations-service pétrolières pourront être adaptées pour proposer les recharges ou l’échange des batteries, lorsque les coûts auront été déterminés. La démarche est déjà initiée aujourd’hui par quelques industriels du secteur de l’énergie et de la distribution.
Les investissements pour l’adaptation du réseau électrique seront réalisés sous la supervision des gestionnaires du réseau et des autorités gouvernementales. Ils seront défrayés par les entreprises concernées.
Le financement public de la recherche sur le stockage d’énergie mobile et sur la voiture autonome proviendra du Programme des Investissements d’Avenir (à travers un nouvel appel à projets Véhicule du futur, doté d’1 Md€, montant comparable à ce qui a été consacré à cette thématique dans le cadre du PIA1 et du PIA2). Une partie du programme sera réservée au secteur du transport de nouvelle génération, à enveloppe globale constante. Cette aide au financement de dossiers de recherche industriels stimulera les projets innovants et prometteurs.
[DVD4] Politique de l’eau : préservons nos ressources
« Les règles environnementales, nous devons les appliquer avec le minimum de bon sens que
les producteurs sont en droit d’attendre de leur administration. »
Bruno Le Maire, déclaration du 24 janvier 2012
I. Pourquoi ?
La politique de l’eau recouvre les trois domaines suivants :
- L’eau en tant que milieu, avec des enjeux principalement écologiques et de lutte contre les pollutions tels que la restauration de la qualité des masses d’eau, depuis les années 90, et, plus localement, la préservation des zones humides et des trames bleues ;
- L’eau en tant que ressource naturelle, avec des enjeux économiques et des problèmes notamment administratifs qui peuvent devenir politiques lors de situations de pénurie d’eau de plus en plus fréquentes ;
- L’organisation du service public de l’approvisionnement en eau avec la question du recours au secteur privé ou à la gestion publique de cette ressource. Ce choix reste cependant du ressort des collectivités locales.
Les questions relatives à la gestion de l’eau sont cependant parfois l’objet d’un mécontentement, surtout parmi les agriculteurs. Ceci peut sans doute s’expliquer par le fait qu’il s’agit d’un domaine qui a connu depuis une trentaine d’années une forte évolution réglementaire avec une augmentation des contraintes, venant parfois remettre en question des pratiques anciennes.
Les deux points les plus critiques sont aujourd’hui :
- Les contraintes de plus en plus fortes entraînées par la politique volontariste de restauration de la qualité des masses d’eau, inspirée par l’Union européenne. L’enjeu politique se situe non pas dans les objectifs mais dans les moyens à mettre en œuvre et le calendrier.
- La concurrence pour les usages de l’eau dans les cas de pénurie d’eau, par exemple dans le cas du barrage de Sivens. Dans certaines régions, les problèmes de rareté de l’eau sont fréquents en été, et sans doute amenés à se multiplier. La loi sur l’eau et les milieux aquatiques adoptée le 30 décembre 2006 au terme d’un processus de plus de 8 ans a permis la mise en place des fondements de la politique actuelle sur l’eau afin d’obtenir un accès à l’eau pour tous avec une gestion plus transparente. Il est nécessaire d’améliorer certains aspects de cette loi qui sont dès à présent considérés comme défaillants. L’objectif étant de permettre aux acteurs économiques d’anticiper le risque et d’investir en conséquence, si besoin est.
La gouvernance de l’eau évolue vite mais reste complexe et inadaptée aux contraintes locales. Les ressources en eau sont gérées au niveau des bassins versants par les six Agences de l’eau. La gouvernance de ces agences repose sur un conseil d’administration au sein duquel l’équilibre des votes est réparti équitablement entre l’Etat, les élus locaux et enfin les ONG, entreprises et usagers. Les grandes orientations, quant à elles, sont prises par les comités de bassins qui regroupent des représentants des différents acteurs du bassin, publics ou privés, agissant dans le domaine de l’eau. Le processus de décision ne tient que très peu compte des contraintes et intérêts économiques locaux. Les problèmes du bassin Adour Garonne ne sont pas ceux de Seine Normandie ! Le poids économique des différentes activités sur un bassin n’est pas intégré dans le choix de la composition des collèges.
II. Quoi ?
1) Simplifier et démocratiser le fonctionnement des Agences de l’eau et des comités de bassins :
Nous proposons que la composition des collèges puisse être différente suivant les régions, de façon à mieux prendre en compte les particularités locales.
2) Améliorer la gestion des pénuries d’eau
Les Agences de l’eau ont l’obligation légale de réaliser un Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE). Le SDAGE du bassin concerné doit ensuite être traduit en Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) locaux. Pour faire face aux pénuries d’eau, nous proposons d’inclure systématiquement dans les SDAGE un plan de gestion des crises de ressources, qui définira une hiérarchisation des usages permettant aux préfectures de prendre des mesures de restriction (à titre d’exemple, interdiction du remplissage des piscines, puis des irrigations de golfs, et enfin des espaces verts).
Parallèlement, un cadre de travail fondé sur des principes nationaux servant de référence à l’action administrative en cas de crise (sécheresse, pollution) devra être établie :
- La priorité à l’approvisionnement domestique jusqu’à concurrence d’un minimum garanti ;
- La priorité à l’agriculture, en échange d’engagements sur des efforts à court et moyen terme. Ces efforts pourraient couvrir la gestion des retenues collinaires (voir fiche A14) et le développement de technologies modernes permettant l’attribution de la “la bonne dose au bon endroit” et l’économie des ressources ;
- La priorité aux usages industriels. Les industries peuvent en effet se préparer plus facilement à subir des risques de manque d’eau passager, avec éventuellement un système tarifaire adapté, basé sur le modèle de l’effacement de pointe en électricité.
3) Moderniser les infrastructures de réseaux
A l’échelon local, les maires conservent la responsabilité de fixer le prix de l’eau et d’entretenir les réseaux. Nous soutiendrons en conséquence les initiatives locales visant à déployer les compteurs d’eau intelligents, que ce soit sur des sites pilotes ou pour des développements massifs, afin d’améliorer la gestion de la demande et d’apporter des services innovants aux collectivités et aux abonnés. Afin d’encourager les investissements dans des systèmes performants d’irrigation, nous proposons que les Agences de l’eau soient incitées à financer les investissements correspondants, en échange éventuel de remises en cause de « droits d’eau » traditionnels parfois très anciens et justifiés seulement par la coutume (voir fiche A14).
III. Comment ?
Ces propositions feront l’objet d’un projet de loi qui sera soumis au Parlement dans le courant du quinquennat pour modifier d’une part les articles L.213-8 et suivants du code de l’environnement afin d’améliorer la gouvernance des agences de l’eau et des comités de bassin et, d’autre part, les articles L.212-1 et suivants afin de modifier les SDAGE pour faire face aux pénuries d’eau.
IV. Combien ?
Les mesures proposées sont d’ordre législatif et n’impliquent pas de conséquences chiffrées à l’échelle du budget de l’Etat.
[DVD5] Biodiversité de l’Outre-mer : un combat pour la génération qui vient
« Je suis pour que nous mettions une méthode nouvelle sur la table en matière de pratiques et de décisions environnementales. »
Bruno Le Maire, discours de Rungis, 19 janvier 2010
I. Pourquoi ?
Les territoires d’outre-mer, souvent insulaires, représentent une grande diversité d’habitats, d’espèces animales et végétales avec un très fort endémisme (c'est-à-dire des espèces que l’on ne retrouve pas en dehors de ces régions). Ainsi:
- La forêt guyanaise est l’une des dernières forêts primaires ;
- 40% de l’île de la Réunion est classée en parc national;
- Mayotte possède un des plus grands lagons fermés et une des rares doubles barrières de corail dans le monde ;
- La Nouvelle-Calédonie possède le plus grand lagon du monde, inscrit au patrimoine mondial;
- 10% des récifs coralliens mondiaux sont dans nos territoires ;
- Clipperton, les Îles Éparses, les Glorieuses possèdent parmi les derniers écosystèmes préservés.
Cette biodiversité est cependant menacée par une exploitation excessive, la pollution et la prolifération d’espèces invasives.
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) indique que la France se situe dans les 10 premiers pays ayant le plus d’espèces menacées et cela concerne en premier lieu les outre-mers.
L’agence française pour la biodiversité, dont la création est annoncée au 1er janvier prochain, i ne répond pas à ces enjeux, notamment en termes de gouvernance. Elle va concentrer l’essentiel de ses forces en métropole où il existe déjà de nombreux acteurs.
II. Quoi ?
1) Articuler la connaissance des enjeux avec leur appropriation collective et le respect des décisions
- Intégrer la connaissance de la biodiversité ultra-marine aux programmes scolaires en biologie. Les élèves français doivent savoir que la France possède, grâce aux outre-mers, une des plus grandes richesses du monde animal et végétal ; ils doivent pouvoir identifier le patrimoine naturel de chaque territoire d’outre-mer.
- Simplifier la gouvernance de la biodiversité outre-mer en la centralisant dans une unique structure de gestion qui serait coordonnée par les collectivités locales. Elle conduirait des programmes de connaissance adaptés aux enjeux locaux pour proposer des mesures efficaces et utiles. Elle apporterait une expertise technique aux décideurs : chefs d’entreprises, associations qui souhaitent limiter leur impact sur la biodiversité sans savoir comment procéder. Elle formerait et sensibiliserait les populations locales à la prise en compte de leur environnement.
- Mettre les services de l’Etat en situation de faire respecter le droit. L’Etat ne doit pas se désengager, il doit concentrer son action sur une analyse forte et indépendante des enjeux pour ne pas laisser faire et contrôler le respect des décisions qu’il a pris.
2) Promouvoir un développement dans le respect des contraintes propres aux territoires
- Conforter la gestion de l’eau notamment son traitement et les rejets côtiers.
- Encourager les projets de production d’énergie renouvelable notamment l’énergie thermique des mers et le photovoltaïque.
- Renforcer la lutte contre l’orpaillage illégal (dispositif HARPIE) : mettre en place un suivi « génétique » de l’or pour distinguer l’or illégal, expérimenter l’usage de drones.
- Maintenir un réseau d’espaces protégées avec une réelle gestion de terrain.
- Soutenir les initiatives citoyennes : un « crowdfunding de la biodiversité ».
- Prévoir une représentation des territoires ultramarins dans les organisations régionales.
- Relancer l’initiative française pour les récifs coralliens.
III. Comment ?
- Coordonner et mutualiser les acteurs ultramarins de la biodiversité au sein de véritables agences territoriales de la biodiversité implantées localement et dotées de réels compétences et moyens.
- Recentrer le rôle de l’Etat sur l’instruction des autorisations. Regrouper les services de contrôle de la biodiversité actuellement éparpillés entre 4 ou 5 organismes différents.
- Appliquer efficacement la loi biodiversité récemment votée. Les décrets d’application devront être revus pour produire des changements en outre-mer.
IV. Combien ?
Nous estimons possible de mobiliser une centaine d’agents de l’Etat sur ce sujet, à périmètre constant en supposant une meilleure répartition des forces.
Utiliser les crédits dédiés à la biodiversité outre mer : des dizaines de M€ sont dans les caisses des opérateurs publics faute de projets.
Le reste des mesures, d’ordre législatif ou réglementaire, n’emporte pas de conséquence de chiffrage à l’échelle du budget de l’Etat. A terme, une meilleure coordination des services publics recentrés sur les instructions et les autorisations doit permettre de réaliser des économies de fonctionnement. Ces économies viendront influer de manière positive sur l’équilibre des comptes publics.
[DVD6] Mix énergétique : préparer l’avenir
« Nous devons avoir à cœur de soutenir le financement des énergies renouvelables pour faire de la France un modèle en matière de mix énergétique. »
Bruno Le Maire, Ne vous résignez pas ! p. 136
I. Pourquoi ?
Parce qu’elles sont complexes, les questions énergétiques n’ont pas été sérieusement traitées par la classe politique des dernières décennies. Et pourtant, elles sont cruciales pour notre avenir. Le choix du “tout nucléaire”, que la France a fait dans les années 1960, était un choix visionnaire dont nous bénéficions encore 50 ans plus tard. Le renouveau, c’est de faire aujourd’hui les choix stratégiques dont nous serons fiers dans 50 ans. C’est de continuer à faire de la France un modèle en matière de politique énergétique.
A la question « quel mix énergétique pour la France ? », nous répondons que ce ne sera plus, à l’avenir, à l’Etat de le fixer arbitrairement. L’Etat doit plutôt en fixer les contraintes (économiques, géopolitiques, environnementales) et laisser émerger les meilleures technologies de production. En particulier, il doit créer les conditions qui permettront à la France (i) de conserver un mix électrique compétitif, (ii) de garantir son indépendance énergétique, (iii) de respecter ses engagements environnementaux internationaux, et enfin (iv) de développer des filières industrielles créatrices d’emplois et rayonnant à l’international.
Ce sont les acteurs du marché de la production d’électricité et l’innovation technologique des entreprises qui seront le mieux à même de constituer le mix électrique de demain. Si l’Etat n’a pas à décider quelles technologies émergeront à l’avenir, il lui incombe en revanche de maintenir un cadre réglementaire stable et adéquat permettant à une saine concurrence de s’exercer et aux technologies les plus pertinentes de s’imposer tout en garantissant une fourniture d'électricité fiable et à un coût compétitif aux ménages et entreprises françaises.
Le secteur de l’électricité est en train de vivre une révolution. Tandis que le prix de l’électricité nucléaire augmente en raison du durcissement des normes de sûreté, d’importants progrès technologiques ont conduit au cours des dix dernières années certaines énergies renouvelables (solaire, éolien) à devenir de plus en plus compétitives. Ces sources de production locales, diffuses, décentralisées, mais néanmoins intermittentes, viennent bousculer le modèle historique, centralisé, constitué de monopoles verticalement intégrés. Facilité par les possibilités offertes par la révolution numérique, ce nouveau modèle ouvre la voie au développement de technologies et de modèles innovants et créateurs de valeur dans les secteurs du stockage de l’électricité, de la gestion intelligente de la demande d’électricité, des smart grids, etc. Dans le même temps, le parc de production électrique européen souffre d’une crise de surcapacité se traduisant par une chute des prix de l’électricité sur les marchés.
Dans ce contexte, la priorité est de permettre à EDF de faire face à des défis sans précédents, conjonction des bouleversements sectoriels en cours mais aussi de trois problématiques propres à l’entreprise :
- Un parc nucléaire vieillissant et la perspective d’un mur d’investissement : près de 80% de nos 58 réacteurs ont été mis en service en moins de 10 ans (décennie 1980), et autorisés pour une durée d'exploitation de 40 ans. Sans prolongation, ils devraient théoriquement fermer entre 2020 et 2030, ce qui se heurterait à des obstacles insurmontables.
- Des enjeux financiers lourds à court terme : outre les investissements qu’exigerait la prolongation des réacteurs actuels, EDF est engagée dans : le projet Hinkley Point, l’absorption d’Areva NP, la finalisation du chantier de l’EPR de Flamanville, tout en étant confrontée à la dégradation de la note de sa dette hybride (aujourd’hui considérée comme spéculative par les agences de notation).
- Un modèle remis en question : conséquence de la chute des prix de l’électricité, de l’évolution baissière de la demande européenne, de la dépréciation des actifs de production traditionnels, de la fin des tarifs réglementés (jaunes et verts) et de l’ouverture à la concurrence, la rentabilité d’EDF, comme celle de ses concurrents européens, sera de plus en plus difficile à maintenir et sa capacité d’investissement s’en trouve actuellement menacée.
La situation actuelle d’EDF résulte en partie de la schizophrénie de l’Etat qui envoie à l’entreprise des signaux contradictoires mêlant son rôle d’actionnaire (normalement incarné via l’Agence des Participations de l’Etat - APE) et son rôle de garant des objectifs de notre politique énergétique (réglementaire, législatif et diplomatique). Depuis vingt ans, l’Etat a eu tendance à privilégier son intérêt à court terme (perception de dividendes) plutôt que l’intérêt à long terme de l’entreprise. Inversement, le fait d’avoir l’Etat pour actionnaire peut conduire une entreprise à repousser les décisions difficiles en comptant sur un renflouement à terme par le contribuable. La recapitalisation d’EDF menée récemment à hauteur de 4 Md€ ne peut être considérée comme une solution pérenne : c’est une réponse aux symptômes mais non aux causes réelles des difficultés rencontrées.
Au global, les questions énergétiques sont absolument critiques pour l’avenir de la France. Nous devons nous attaquer en priorité au problème de la surcapacité et au manque de visibilité, nous assurer de la gestion responsable du mur d’investissement, et clarifier et stabiliser la relation entre l’Etat et EDF. Par ailleurs, nous devons continuer à favoriser l’innovation énergétique en France en vue d’assurer à notre pays un rôle de premier plan sur les technologies de demain et le maintien d’un accès pour tous à une énergie compétitive et décarbonée.
II. Quoi ?
- En tant qu’Etat garant des objectifs de notre politique énergétique, restaurer la visibilité indispensable à nos filières industrielles en exigeant d’EDF un plan d'action avec un échéancier détaillé, centrale par centrale, en vue d'échelonner les remplacements, les prolongations et les fermetures, qui sera soumis à l’examen technico-économique de la CRE (Commission de Régulation de l’Energie) et de l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire, indépendante) avant la fin de l’année 2017. Ce plan devra être conforme avec les objectifs 2030, maintenir une électricité la plus compétitive possible pour les consommateurs, notamment industriels, et sauvegarder l’indépendance énergétique de la France. Une conséquence indissociable de la mise en œuvre de ce calendrier sera de contribuer simultanément à réduire la surcapacité et donc à restaurer des marges de manœuvres pour les producteurs d’électricité, notamment EDF.
- En tant qu’Etat actionnaire d’EDF, s’assurer que les ressources financières libérées grâce à l'absence de prolongation automatique de l'ensemble des centrales, qui se traduira par un coût du grand carénage plus faible que prévu, seront réinvesties dans les capacités de production de demain, qu’elles soient nucléaires ou renouvelables, et dans l’innovation, en particulier dans les technologies de stockage de l’électricité et d’intégration au réseau. Concomitamment, la nécessité de remplacer une partie des réacteurs nucléaires qui fermeront par de nouvelles capacités de production donnera à nos entreprises la possibilité de mettre en application de manière concrète leur savoir-faire en matière de nouvelles technologies. Cette montée en puissance des nouvelles technologies permettra notamment de s’affranchir de tout recours à l’exploitation des gaz de schistes sur le territoire de notre pays tout en préservant notre indépendance énergétique.
- Maintenir les Réseaux de Transport (RTE) et de Distribution (Enedis) d’électricité dans la sphère publique tout en les adaptant aux évolutions du secteur. Nous prenons l’engagement de ne pas les privatiser mais proposons cependant que leur actionnariat, tout en restant public, évolue dans le sens d’une plus forte indépendance vis-à-vis d’EDF.
III. Comment ?
Ces propositions feront l’objet de décrets qui seront adoptés en début de quinquennat :
- La proposition de calendrier d’EDF, sous réserve qu’elle soit conforme aux principes ci-dessus évoqués et qu’elle reçoive la validation de la CRE et de l’ASN, sera inscrite dans la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie et formalisée dans un décret d’application de l’article 176 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte qui viendra compléter le décret actuellement en cours de préparation et attendu pour fin 2016, lequel élude soigneusement la question de l’avenir du parc nucléaire.
- Le mécanisme de la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie tel qu’il est déjà prévu par la loi permettra de suivre le respect de la mise en œuvre du calendrier prévu et de faire éventuellement des ajustements tous les 5 ans. Il devra être néanmoins renforcé en modifiant l’article 187 de la loi pour y inclure un véritable contrôle parlementaire et un pouvoir de sanction. Outre ce mécanisme, la CRE et l’ASN assureront également le contrôle public de l’application du calendrier.
IV. Combien ?
La prolongation de l’ensemble du parc nucléaire a été chiffrée à 100 Md€ par la Cour des Comptes. Notre proposition vise à assurer la transparence et la visibilité de l’opération, et à réorienter une partie de ces ressources vers les technologies de demain en lieu et place de la seule prolongation de tous nos réacteurs. Cette proposition n’implique donc pas un euro de dépense supplémentaire par rapport à l’investissement global de 100 Md€ nécessaire pour assurer la pérennité de notre approvisionnement énergétique.
En second lieu, nous proposons des réformes visant à une meilleure gouvernance des entreprises publiques et une plus grande indépendance des réseaux de transport et de distribution afin de pérenniser ces services publics. Ces réformes n’ont pas d’impact budgétaire. La mise en œuvre d’une meilleure gouvernance aura des répercussions positives sur la santé financière et industrielle de nos entreprises publiques, et donc sur le dynamisme économique de notre pays.
[DVD7] Energies renouvelables : moins de contraintes, plus d’efficacité
« Le premier problème des entreprises françaises, c'est la complexité et la lourdeur administrative auxquelles elles sont confrontées. Les créateurs d'emplois, ce sont les entrepreneurs, pas l'État ! Face au mur de contraintes, de taxes, de charges et de décisions difficiles à prendre, les entrepreneurs sont souvent seuls. Je veux être à leurs côtés et les aider à entreprendre dans un environnement sain. Il faut changer l'esprit qui règne dans l'administration et une partie de la classe politique vis-à-vis des entrepreneurs. C'est une vraie révolution que je veux mener dans ce domaine ! »
Bruno Le Maire, Chef d’Entreprise, 5 novembre 2012
I. Pourquoi ?
Le cadre juridique et réglementaire en vigueur dans notre pays s’est alourdi au fil des années au point de devenir un obstacle à la réalisation de projets liés à l’activité privée ou publique. Ce constat est particulièrement alarmant en ce qui concerne les procédures d’urbanisme : les délais de mise en conformité des plans locaux d’urbanisme (PLU) et d’obtention de permis de construire sont trop longs, les multiples autorisations requises dans certains cas (défrichement, dérogation espèce protégée, loi sur l’eau, autorisation ICPE, etc.) rendent les dossiers pléthoriques, les durées de validité des autorisations et les différents délais de recours ne sont pas harmonisés, les tribunaux administratifs sont engorgés.
Dans le domaine particulier des énergies renouvelables, cette complexité se traduit par des délais de réalisation de projets parmi les plus élevés d’Europe. Il faut en moyenne 4 ans pour raccorder une ferme solaire au réseau, et 6 à 8 ans pour une ferme éolienne, contre 2 ans et demi en Allemagne. Ces délais menacent la viabilité de nos entreprises et obèrent les capacités de la France à respecter ses engagements à la fois nationaux (40% d’énergies renouvelables dans le mix électrique à l’horizon 2030) et internationaux (40% de réduction des émissions d’ici 2030).
II. Quoi ?
Il s’agit de mener des réformes de simplification ambitieuses sans renoncer à la préservation de l’environnement et du cadre de vie des Français ni se substituer localement au travail mené par les élus comme par les services des préfectures. Ces mesures visent d’une part à simplifier le travail des porteurs de projet afin de favoriser l’emploi et la croissance de nos entreprises, et d’autre part à simplifier le travail des administrations qui instruisent les dossiers afin d’aller vers plus d’efficacité dans l’emploi des ressources publiques dédiées à cette mission. Les axes proposés sont les suivants :
- Rationaliser le cadre juridique et réglementaire
- Aligner les durées de validité et de recours de l’ensemble des autorisations ;
- Supprimer les redondances et contradictions entre les différentes autorisations et/ou dispositifs réglementaires ;
- Remédier aux inégalités de traitement entre les différentes énergies.
- Améliorer le dialogue entre les porteurs de projets et les administrations
- Encadrer par la loi les délais d’instruction des projets et de réponse des administrations, et généraliser la règle selon laquelle l’absence de réponse dans les délais vaut acceptation et non refus ;
- Dématérialiser les procédures d’instruction ;
- Mettre un terme aux divergences d’interprétation du cadre selon les départements et les régions.
- Réformer la gouvernance et réaffirmer l’autorité de l’Etat
- Accélérer l’instruction des recours et lutter contre les abus. L’instruction d’un recours contre une autorisation administrative peut durer jusqu’à 8 années, alors même que le taux de requêtes rejetées (et donc d’autorisations confirmées) était de 76 % en 2012 dans le secteur de l’éolien;
- Imposer davantage de transparence dans la saisine et la composition des différentes instances consultées pour avis, notamment lorsque cet avis n’est pas que consultatif : commission départementale de la nature des paysages et des sites (CDNPS), commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF)…
III. Comment ?
Ces propositions feront l’objet d’un projet de loi qui sera soumis au Parlement au début du quinquennat afin qu’elles puissent produire de l’effet (sur la croissance, sur l’emploi) au cours du mandat. Ce projet de loi comprendra les dispositions suivantes :
- Étendre à toutes les autorisations (défrichement, dérogation espèce protégée, loi sur l’eau, ICPE, etc.) le décret n° 2016-6 du 5 janvier 2016 relatif à la durée de validité des autorisations d'urbanisme, lequel prévoit la possibilité de proroger un permis de construire jusqu’à dix ans à compter de la délivrance de l'autorisation d'urbanisme. Inclure dans cette mesure la généralisation de la prorogation tacite de l’enquête publique prévue à l’article R.553-10 du code de l’environnement (« La prorogation de l'enquête publique est acquise si aucune décision n'a été adressée à l'exploitant dans le délai de deux mois à compter de la date de l'avis de réception de la demande par le représentant de l'Etat dans le département »).
- Encadrer les délais d’instruction des dossiers : ils ne sont aujourd’hui encadrés (par les articles L123-9, L123-10, R423-5, R 423-20, R 423-23) qu’à compter du lancement de l’enquête publique. Avant cela, un commissaire enquêteur doit être désigné par le tribunal administratif dans un délai non défini (en moyenne 5 à 8 mois en l’état actuel de l’engorgement des tribunaux). Une fois le commissaire enquêteur désigné, la publication de l’arrêté de lancement de l’enquête publique, et la date de début de l’enquête publique elle-même, interviennent sous un délai entièrement à la discrétion du préfet (en moyenne 2 à 4 mois). Il s’agit donc d’ajouter deux alinéas aux articles L123 et R423 :
- Encadrer le délai entre la complétude du dossier de demande d’autorisation d’urbanisme et la nomination du commissaire enquêteur à 2 mois maximum. Imposer aux tribunaux administratifs de prendre les dispositions nécessaires (automatisation, élargissement des viviers de commissaires enquêteurs, etc.) pour tenir ces délais.
- Encadrer le délai entre la nomination du commissaire enquêteur et le démarrage de la consultation de l’enquête publique à 2 mois maximum.
- Étendre à toutes les autorisations d’urbanisme et autorisations administratives les dispositions déjà en place visant à encadrer les recours et les outils tendant à accélérer le traitement des procédures contentieuses. Ces mesures et outils sont actuellement en vigueur sur certaines autorisations ou pour certaines énergies seulement :
- Article L. 600-7 du code de l’urbanisme contre les recours abusifs (actuellement limité aux autorisations d’urbanisme) ;
- Décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 pour fixer à trois mois le délai au-delà duquel des moyens nouveaux ne peuvent plus être invoqués dans un recours au Tribunal Administratif (actuellement limité aux autorisations ICPE) ;
- Article L600-1-2 du code de l’urbanisme qui prévoit qu’un recours de particulier n’est recevable que si la construction, l’aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien (actuellement limité aux autorisations d’urbanisme) ;
- Décret n° 2016-9 du 8 janvier 2016 prévoyant la désignation d’une cour administrative d’appel unique compétente en premier et dernier ressort (actuellement limité aux seuls projets d’énergie marine renouvelable) ;
- Article L. 600-1 du code de l’urbanisme, qui prévoit que l’illégalité pour vice de forme ou de procédure d’un document de planification ne peut plus être invoquée par voie d’exception au delà d’un délai de 6 mois. Actuellement limité aux seuls schémas de cohérence territoriale (SCOT), plans locaux d’urbanisme (PLU) ou carte communale, il est proposé que cet article soit généralisé à l’ensemble des documents de planification : Schémas Régionaux Climat Air (SRCAE), Schémas Régionaux de Cohérence Ecologique (SRCE), Schémas Directeurs d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE), Schémas d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE), etc.
- Supprimer les redondances et contradictions entre les différentes autorisations et/ou dispositifs réglementaires et remédier aux inégalités de traitement entre les différentes énergies.
- Instaurer une procédure de demande unique pour toutes les autorisations.
- Généraliser le principe selon lequel une seule enquête publique suffit pour l’instruction de l’ensemble des autorisations, y compris pour la mise en conformité d’un document d’urbanisme.
- Modifier l’article L.121-12 du code de l’urbanisme pour autoriser les projets d’énergies renouvelables sur des sites dégradés (décharges, carrières, etc.) en zone littorale. Cet article est aujourd’hui limité aux seuls projets éoliens.
- Améliorer le dialogue entre les porteurs de projets et les administrations.
- Mettre un terme aux divergences d’interprétation du cadre selon les départements et les régions : désigner au sein de l’administration centrale un référent national compétent pour donner une interprétation unique des diverses questions que pose l’instruction d’un dossier.
- Dématérialiser les procédures d’instruction des projets : les dossiers de demande d’autorisation doivent généralement être fournis en 10 à 20 exemplaires papier (à destination de la Mairie, la DDT, la DREAL, les ABF, la DGAC, le SDIS, le Service Archéologie, etc.) selon les cas et les usages en vigueur dans le département concerné. Pourtant, une version électronique serait en général amplement suffisante pour la plupart des besoins liés à l’instruction.
IV. Combien ?
Ces mesures ne représentent aucun coût additionnel mais permettront au contraire de générer des économies substantielles par un meilleur emploi des ressources publiques dédiées à l’instruction des dossiers.
La réduction des délais de réalisation des projets et la simplification des procédures vont se traduire par une croissance de nos entreprises et un signal fort à l’intention des investisseurs. Des recettes fiscales en résulteront.
Les entreprises du secteur embaucheront, avec un impact positif sur les comptes de l’assurance chômage.
[DVD8] Energies locales : nous soutiendrons l’autoconsommation
« Nous devons avoir à cœur de soutenir le financement des énergies renouvelables pour faire de la France un modèle en matière de mix énergétique. »
Bruno Le Maire, Ne vous résignez pas ! p. 136
I. POURQUOI ?
Le prix des panneaux solaires photovoltaïques a été divisé par 10 en 10 ans, passant de 5 €/Wc en 2006 à 0,50 €/Wc en 2016.
C’est la conséquence de deux facteurs simultanés :
- L’innovation technologique, qui a conduit à d’importants gains de compétitivité et de rendement.
- Les économies d’échelles dans la fabrication, en raison de la très forte croissance de la demande mondiale. Plus de 55 GWc d’installations solaires ont été raccordés au réseau en 2015, portant la capacité totale installée à 233 GWc. En 2006, la capacité raccordée ne s’était accrue que de 1,5 GWc, pour un total de 6,6 GWc.
En parallèle, la tendance du prix de vente aux clients finaux de l’électricité en France est à la hausse. Depuis plusieurs années, EDF et le régulateur réclament au Ministère de l’énergie (sans toujours l’obtenir) une augmentation des tarifs régulés, afin de couvrir les coûts de maintenance croissants du parc nucléaire existant et d’anticiper l’effort financier que représenterait son éventuelle prolongation (100 Md€ selon la Cour des Comptes).
Dans ce contexte, il faut donc s’attendre à ce qu’un nombre croissant de consommateurs (particuliers, industriels, collectivités) trouvent un intérêt économique à autoconsommer leur électricité, c’est-à-dire à acheter leur propre installation solaire non pas dans le but de vendre leur électricité sur le réseau à des tarifs subventionnés (schéma mis en œuvre jusqu’à présent) mais dans le but de la consommer directement sur place pour réduire leur consommation en provenance du réseau, et donc leur facture sans augmenter le volume de la CSPE.
Il faut voir dans l’autoconsommation une opportunité à plusieurs titres :
- L'autoconsommation encourage le développement de technologies innovantes (stockage, domotique, gestion intelligente de la consommation, etc.) et mobilise des technologies et des savoir-faire dans le numérique et le "big data". C’est un marché potentiel pour les start-ups françaises du numérique.
- L’autoconsommation rend les citoyens acteurs de la gestion de leur énergie, ce qui est sans doute un des leviers les plus puissants de réduction de la consommation d'énergie. Un consommateur qui autoconsomme est davantage conscient de ses consommations qu'un consommateur qui se contente d'appuyer sur un bouton. Plusieurs expérimentations ont démontré que l'usage d'énergie devenait plus sobre chez les foyers équipés de systèmes d'autoconsommation.
- L’autoconsommation est un marché en forte croissance dans le monde. Les technologies requises par l'autoconsommation sont celles qui permettront de répondre, par exemple, à la question de l'électrification de l'Afrique, un marché considérable sur lequel les entreprises françaises ont une carte à jouer.
- L’autoconsommation permet de rapprocher la production électrique des lieux de consommation. Elle s’inscrit dans une dynamique globale de réappropriation des questions énergétiques par les territoires et les citoyens. Selon OpinionWay, 88% des Français souhaiteraient autoconsommer à partir d’électricité solaire photovoltaïque.
L’ordonnance n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 jette les premières bases de l’émergence de l’autoconsommation en France mais le texte est largement perfectible, en ce qu’il définit un régime juridique incomplet et instaure une complexité excessive sur un segment qui n’en est encore qu’à ses balbutiements.
II. QUOI ?
1) Améliorer le cadre fixé par l’ordonnance du 27 juillet 2016 afin d’achever la levée des freins artificiels, juridiques et réglementaires qui pèsent aujourd’hui sur le développement de l’autoconsommation :
- Assouplir le cadre juridique de l’autoconsommation collective :
- Il est aujourd’hui obligatoire de créer une société pour que l’autoconsommation en immeuble collectif soit possible. Cette exigence est très contraignante : nous proposons d’ouvrir l’autoconsommation aux associations, coopératives et syndicats de copropriétaires.
- Actuellement, l’autoconsommation collective est restreinte aux consommateurs et producteurs situés dans un même bâtiment. Nous proposons d’étendre ce cadre juridique pour qu’il s’applique à l’échelle d’un quartier. Une toiture solaire sur un bâtiment inoccupé (par exemple des bureaux un jour férié) pourra ainsi bénéficier à des consommateurs situés dans un bâtiment voisin.
- Permettre à un locataire d’autoconsommer l’électricité produite par les panneaux équipant sa toiture, que ceux ci soient détenus par le propriétaire du bâtiment ou par un tiers : en effet, il est fréquent dans le secteur industriel / tertiaire que l’occupant d’un bâtiment n’en soit pas le propriétaire, ce qui peut freiner le développement de l’autoconsommation dans ce secteur. C’est d’autant plus regrettable que l’autoconsommation y est plus pertinente que dans le secteur résidentiel : la consommation du site et la production solaire coïncident davantage, et des outils de pilotage de la demande y sont déjà fréquemment utilisés.
- Étendre ce nouveau cadre juridique aux installations de stockage, qui sont aujourd’hui exclues alors qu’il s’agit incontestablement d’un axe de développement technologique majeur.
- Dans le résidentiel spécifiquement : supprimer progressivement le « tarif d’achat » actuel (qui porte sur la totalité de l’électricité produite par une installation solaire) et le remplacer par des dispositifs imposant des parts croissantes d’électricité autoconsommée.
2) Les pouvoirs publics ont la responsabilité d’accompagner cette évolution pour qu’elle puisse se faire dans de bonnes conditions. L’autoconsommation soulève en effet deux défis importants :
- Assurer la conformité et la sécurité des installations. Il convient d’encadrer la commercialisation et l’installation de panneaux solaires, pour se prémunir d’une part contre les dangers potentiels qui résulteraient de comportements frauduleux d’installateurs ou de consommateurs peu scrupuleux et, d’autre part, pour dimensionner correctement les installations au regard des besoins locaux.
- Assurer le maintien du financement des réseaux de transport et de distribution de l’électricité. Autoconsommation ne signifiant pas autarcie, les consommateurs continueront d’avoir besoin d’un réseau électrique fiable et disponible. Or le développement de l’autoconsommation pourrait menacer l’équilibre économique des gestionnaires de réseaux (Enedis et RTE), car leurs revenus sont calculés proportionnellement aux kilowattheures qui y transitent. Une réforme de ce mode de calcul est donc indispensable pour évoluer d’un système de péage (en kilowattheures) à un système d’abonnement (en fonction de la puissance en kilowatt). C’est par un mouvement similaire que l’usage d’internet (qui est comme l’électricité une industrie de réseau) est passé progressivement d’une facturation à la minute à une utilisation illimitée avec facturation par abonnement.
III. COMMENT ?
Leviers d’action :
Proposition 1 : Cette proposition fera l’objet d’ordonnances adoptées dans le courant du quinquennat afin de modifier les articles L315-1 à L315-7 du Code de l’Energie.
Proposition 2 : Une consultation a d’ores et déjà été lancée par la commission de régulation de l’énergie (CRE), ouvrant la voie à la réforme proposée. Il convient d’en accélérer la mise en œuvre en priorisant la publication des textes réglementaires qui seront recommandés.
Progressivité de mise en œuvre :
Qu’il s’agisse de la levée des freins réglementaires ou de la réforme du tarif d’utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE), la progressivité de mise en œuvre est essentielle pour donner le temps aux acteurs de la filière de s’adapter.
- D’une manière générale, ne pas créer de frein en amont sur l’autoconsommation, mais se tenir prêt à accompagner les évolutions lorsque celles-ci seront mieux connues.
- Privilégier une phase de test et des expérimentations à petite échelle et à différents niveaux (particulier, poste source, boucle locale etc.) plutôt que la mise en place d’une usine à gaz réglementaire.
IV. COMBIEN ?
Encourager l’autoconsommation ne présentera aucun surcoût pour l’Etat. Au contraire, elle permet de faire financer les nouvelles installations photovoltaïques par des économies d’électricité plutôt que par la CSPE.
L’exemple de l’Allemagne permet de donner un ordre de grandeur des économies de CSPE potentielles. En Allemagne, en 2014, l’autoconsommation a représenté 5,6 % de l’électricité d’origine photovoltaïque, soit 2 TWh. Dans l’hypothèse où la France atteindrait la même performance à horizon 2020, l’économie annuelle de CSPE serait de l’ordre de 400 M€ sur un total de 2,5 Md€ (part de la CSPE actuellement dédiée au solaire photovoltaïque).
Des rentrées fiscales additionnelles liées au développement des entreprises du secteur (installateurs, fabricants de matériels, etc.) peuvent être attendues. En revanche, l’effet de ces recettes supplémentaires sera atténué par la diminution des rentrées fiscales concernant la TVA et la TCFE (taxe qui revient aux collectivités locales) portant sur les factures d’électricité.